Le 1er avril dernier est entré en vigueur l’ensemble des dispositions de la Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences (L.Q. 2015, c.1, ci-après la « Loi 10 »).
Cette loi a fondamentalement modifié l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux par l’intégration régionale des services. C’est ainsi que sont nés, notamment, les centres intégrés de santé et de services sociaux (ci‑après « CISSS ») et les centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (ci‑après « CIUSSS »). A également vu le jour la notion d’établissement dit « regroupé » (par opposition à fusionné), qui jouit d’un statut hybride, se situant entre celui des établissements non fusionnés et celui des établissements fusionnés.
La présente chronique a pour objet de présenter un bref aperçu du statut particulier des établissements regroupés.
Ce que prescrit la Loi 10
Au Québec, dix-sept établissements regroupés rattachés à un CISSS ou à un CIUSSS (art. 5, Loi 10) se répartissent dans les 5 régions suivantes :
- 03 Capitale-Nationale
- 05 Estrie
- 06 Montréal
- 13 Laval
- 16 Montérégie
L’annexe I de cette chronique les présente.
Chaque établissement regroupé, bien qu’il poursuive ses activités selon ce qui est prévu à son permis et qu’il conserve sa personnalité juridique distincte, ne dispose plus d’un conseil d’administration qui lui est propre. C’est celui du CISSS ou du CIUSSS qui administre désormais ses affaires et en exerce tous les pouvoirs, comme s’il y avait eu fusion (art. 5 et 28, Loi 10).
Les pouvoirs du conseil d’administration (CISSS ou CIUSSS)
Le conseil d’administration du CISSS ou du CIUSSS doit cependant obtenir l’accord des membres d’un établissement regroupé qu’il administre pour toute décision relative à l’accès aux services de nature culturelle ou linguistique rendus dans les installations de cet établissement (art. 28, Loi 10). À la base, le statut hybride que le législateur attribue aux établissements regroupés s’explique d’ailleurs par des considérations culturelles et linguistiques. À titre d’exemple, les établissements suivants ont le statut d’établissement regroupé : l’Hôpital général juif Sir Mortimer B. Davis, l’Hôpital chinois de Montréal et l’Hôpital Santa Cabrini. En outre, lorsque l’établissement regroupé est aussi une personne morale visée à l’article 139 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ, c. S-4.2 (anciennement désignée « corporation-propriétaire »), certains pouvoirs reliés au patrimoine immobilier sont exercés et attribués aux membres de cette personne morale.
La structure organisationnelle
La structure organisationnelle d’un établissement regroupé est la même que celle du CISSS ou du CIUSSS avec lequel il est regroupé. Dès lors, le président-directeur général, le personnel d’encadrement, les conseils, les instances et les comités de chaque CISSS ou CIUSSS exercent également leurs fonctions et responsabilités à l’égard du ou des établissements regroupés.
Les dossiers des usagers
Contrairement aux dossiers des usagers des établissements fusionnés qui deviennent les dossiers et documents du CISSS ou du CIUSSS, les dossiers des usagers d’un établissement regroupé sont réputés être aussi les dossiers du CISSS ou du CIUSSS.
Les conséquences du regroupement sur les unités d’accréditation
C’est donc en toute logique que le législateur a assimilé les fusions et regroupements résultant de l’application de la Loi 10 à une fusion ou à une intégration au sens de la Loi concernant les unités de négociation dans le secteur des affaires sociales (RLRQ, c. U‑0.1 ou « Loi 30 »). Rappelons que cette loi prévoit la procédure à suivre en pareille circonstance afin d’établir les quatre nouvelles unités d’accréditation qui régiront l’ensemble des salariés à l’emploi des établissements fusionnés et regroupés. Ainsi, à l’issue de ce processus, les salariés de l’établissement regroupé et les salariés du CISSS ou du CIUSSS qui l’administre seront liés par les mêmes unités d’accréditation (art. 126, Loi 10). Plus encore, la Loi 10 prévoit expressément que les employés d’un établissement regroupé deviennent, sans autre formalité, les employés du CISSS ou du CIUSSS qui l’administre (art. 169, Loi 10).
Conclusion
Bien que les établissements regroupés jouissent d’un statut hybride, qui se distingue en principe de celui des établissements fusionnés, notre analyse de la Loi 10 démontre qu’ils n’échappent pas aux transformations majeures du réseau de la santé et des services sociaux. Les établissements regroupés seront largement gérés et administrés par les CISSS ou les CIUSSS, mais pourront continuer d’exercer leurs activités selon leur permis actuel, comme personne morale distincte. Quant aux salariés, depuis le 1er avril dernier leur nouvel employeur est devenu le CISSS ou le CIUSSS auquel l’établissement regroupé est rattaché. Ils seront donc visés par l’organisation des rapports collectifs du travail s’y appliquant.