Conseils stratégiques en vue de la préparation de la médiation et l’arbitrage concernant les dispositions locales des conventions collectives dans le réseau
Le 6 juillet dernier, notre collègue, Me Janie-Pier Joyal-Villiard, a publié une chronique s’intitulant « médiation-arbitrage : le décompte est commencé! » qui explique la procédure (obligatoire) de médiation et d’arbitrage prévue à la Loi 30 afin de régler les désaccords qui subsistent concernant le libellé des dispositions locales des conventions collectives dans le réseau de la santé et des services sociaux.
Lors des séances de négociations auxquelles notre équipe a participé, il a été constaté, sans trop de surprise, que le libellé de certaines dispositions, notamment celle portant sur la matière no 6 (Les règles applicables aux salariés lors d’affectations temporaires) faisait l’objet de désaccords importants entre l’employeur et le syndicat. Bien que certains établissements ont pu convenir d’une entente de principe, selon nos informations, des désaccords persisteraient toujours pour plusieurs établissements, notamment à l’égard de cette matière.
Dans ce contexte, nous vous proposons, à titre d’illustration, un exemple de préparation stratégique en vue de la médiation et d’un possible arbitrage qui pourrait débuter incessamment relativement à cette matière.
Rappelons que l’arbitre devra choisir entre l’offre patronale et l’offre syndicale en respectant les 2 critères suivants (article 42 de la Loi 30) :
- L’offre ne doit pas entraîner des coûts supplémentaires à ceux qui sont existants pour la mise en œuvre des matières visées;
- L’offre doit assurer la prestation des services à la clientèle.
Il est d’abord important de bien cibler les enjeux, tant pour l’employeur que pour le syndicat qui sont liés aux affectations temporaires et à la liste de rappel. Par exemple, on s’attardera à évaluer les coûts d’orientation ou reliés aux surplus de personnel de l’équipe volante, l’impact réel des supplantations sur la continuité des soins, les situations de bris de service occasionnées par la mise en œuvre des demandes syndicales si elles devaient être acceptées, l’impact sur le temps supplémentaire et le respect de l’ancienneté des salariés en disponibilité, etc.
Il est à noter que la Loi 30 prévoit que les parties doivent avoir l’occasion de faire valoir leurs points de vue respectifs en lien avec leur proposition finale et le respect des critères légaux (art. 42). Cette loi réfère à certaines dispositions du Code du travail (C.T.) concernant les pouvoirs généraux de l’arbitre en matière d’arbitrage de différend (art. 48). L’article 81 C.T. édicte, quant à lui, que « l’arbitre procède en toute diligence à l’instruction du différend selon la procédure et le mode de preuve qu’il juge approprié ».
Or, force est de constater que ce qui ressort de la jurisprudence issue de la première vague de négociation locale, c’est que peu de décisions font état d’une preuve ou d’une démonstration de l’une ou l’autre des parties quant aux deux critères prévus dans la loi. Lorsque l’employeur a invoqué des coûts supplémentaires, il s’est d’ailleurs parfois fait dire que cela n’avait pas été prouvé et ses prétentions ont été rejetées. Pourquoi? La seule conclusion qui s’impose, c’est que le simple fait d’alléguer des coûts supplémentaires ne constitue pas une démonstration probante de ces coûts.
Aussi, en lien avec ces enjeux et considérant les deux critères prévus à la Loi 30, nous vous conseillons d’identifier avant le début de la médiation pour chacun des éléments de cette matière encore en litige, notamment:
- Est-ce que les propositions patronales ou syndicales sont basées ou non sur le statu quo des conventions antérieures?
- Considérant la mise en commun de plusieurs conventions collectives, quel est ce statu quo? Est-ce celui de la majorité et donc de l’établissement regroupant le plus de personnes salariées appartenant à la catégorie visée à l’origine? Est-ce celui du syndicat gagnant? Est-ce plutôt celui du syndicat majoritaire à l’origine?
- Est-ce que chacune des propositions respecte ou non les critères légaux?
- Qui devra témoigner, le cas échéant, concernant l’impact au niveau des coûts?
- Qui devra témoigner, le cas échéant, au sujet de la continuité des soins?
- Quels documents devrez-vous produire au soutien de vos propositions?
- Quels documents devrez-vous produire pour démontrer le caractère inadéquat des propositions syndicales?
- Devez-vous mandater immédiatement une personne (directeur, conseiller, professionnel, expert, etc.) pour préparer de tels documents?
Une rencontre préparatoire devrait être envisagée rapidement avec ces personnes afin de développer votre argumentaire qui sera présenté devant le médiateur-arbitre nommé par le ministre.
N’hésitez surtout pas à faire valoir que vos arguments en lien avec les deux critères s’appuient sur des données objectives et une démonstration réelle, exemples et documents à l’appui. Faites valoir que vous avez des gens disponibles pour faire ces démonstrations et que vous tenez à ce que ceux-ci soient entendus, le tout au soutien de votre offre finale comme au soutien du rejet de l’offre syndicale dans l’hypothèse où cette dernière offre ne respecte pas l’un ou l’autre de ces critères.
Le soussigné et tous les membres de l’équipe de négociateurs de Monette Barakett sommes toujours disponibles pour vous accompagner afin de vous permettre d’atteindre vos objectifs de négociation.
Outre le soussigné, cette équipe est composée des négociateurs suivants : Jean-Guy Payette, Jean-François Pedneault, François Perron, François-Nicolas Fleury, Stéphanie Rainville, Matthieu Désilets, Janie-Pier Joyal-Villiard, Camille Dulude et Olivier Douville. Le soussigné remercie chaleureusement ce dernier pour sa contribution à la rédaction de la présente chronique.